Méthode K/Ar Cassignol-Gillot

Principe


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Le chronomètre K-Ar

Selon la technique de mesure conventionnelle, le potassium et l'argon sont dosés séparément, le potassium comme élément solide par voie chimique, l'argon en tant que gaz, par spectrométrie de masse:

Pour une description complète:

C. Cassignol and P.-Y. Gillot, Range and effectiveness of unspiked potassium-argon dating: Experimental groundwork and applications, 159-179 pp., John Wiley, New York, 1982.

P.-Y. Gillot and Y. Cornette, The Cassignol technique for potassium-argon dating, precision and accuracy: examples from late Pleistocene to recent volcanics from southern Italy, Chemical Geology 59, 205-222, 1986.

Gillot, P.Y., Hildenbrand, A., Lefèvre, J.C., and C. Albore-Livadie, 2006. The K/Ar dating method : principle, analytical techniques, and application to Holocene volcanic eruptions in Southern Italy. Acta Vulcanologica, 18 : 55-66.


Mesure du potassium

Le potassium est dosé en général par voie chimique, s'agissant d'un des constituants majeurs des roches. En effet, le potassium 40, radioactif, représente aujourd'hui un taux de 1,167 10-4 du potassium naturel. Le dosage du potassium naturel dans la roche ou le minéral à dater permet donc de déduire sa teneur actuelle en potassium 40 par gramme d'échantillon ; c'est la valeur de N que nous reporterons dans l'équation d'âge. On voit par là que l'incertitude analytique sur ce dosage du potassium est directement reportée sur la valeur d'âge calculée. Il faut donc effectuer ce dosage du potassium avec la plus grande précision, particulièrement pour les échantillons d'âge élevé (> 1 Ma), quand la quantité d'argon accumulé est telle que son dosage devient de plus en plus précis.

La technique de mesure la plus couramment appliquée est la spectrométrie de flamme. En effet, le potassium, élément alcalin aisément excitable, est facilement dosé selon cette technique qui consiste à mesurer l'émission photonique caractéristique de l'élément potassium, sélectionnée par un monochromateur et amplifiée par un photomultiplicateur. Pour cela, une fraction aliquote de notre minéral à doser est mise en solution grâce à une attaque acide ; l'acide fluorhydrique est utilisé pour détruire les réseaux cristallins de silicates et libérer les différents cations participant à l'assemblage. La solution ainsi obtenue est injectée dans la flamme du spectrophotomètre.

Cette technique de mesure est capable de détecter des concentrations très faibles, jusqu'à la fraction de ppm. La gamme de mesure est typiquement de 1 à 3 ppm, aussi, la prise d'attaque et le taux de dilution du résidu obtenu seront adaptés à cette sensibilité. Cette technique permet de doser la teneur en potassium élément avec une précision relative de l'ordre de 1%, quelque soit la concentration de notre minéral qui peut varier entre 0,1 % (1000 ppm) et 15 %.

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Mesure de l'argon

 

 

a. Extraction

L'argon 40 accumulé par la désintégration du potassium 40 est extrait du minéral par fusion sous vide à l'aide d'un four haute fréquence. Pour cela, une fraction aliquote du minéral est placée dans un creuset à l'intérieur d'une enceinte sous vide qui est placée au coeur d'un solénoide parcouru par un courant haute fréquence ; celui-ci induit un courant dans la structure métallique du creuset ; la polarité du courant alternant à haute fréquence, elle crée de fait une agitation électronique et donc un échauffement de la masse métallique du creuset qui, par rayonnement, transmet sa température à l'échantillon. On peut ainsi atteindre des températures de près de 2000° C. La plupart des minéraux fondent entre 800 et 1200°C laissant échapper les gaz qu'ils contiennent, H2O, hydrocarbures ou CO2 pour l'essentiel, plus l'argon qui nous intéresse, largement dilué.

b. Purification

Il convient donc de séparer l'argon des autres gaz. En tant que gaz noble, l'argon est chimiquement inerte. On va donc le purifier en provoquant la réaction chimique des autres gaz et leur combinaison avec un métal chauffé au rouge ; on utilise généralement le titane, très réactif et dont les composés sont stables en température. Grâce à cette réaction, l'argon et les autres gaz rares sont isolés. Le plus abondant après l'argon est l'hélium, dont la température de condensation est très inférieure à celle de l'azote liquide. En condensant notre gaz purifié à la température de l'azote liquide, on pourra ainsi éliminer l'hélium par pompage. Les autres gaz rares (néon, krypton) sont en quantité si faible qu'ils n'ont aucune influence sur l'analyse, d'autant que leur inertie chimique n'affecte en rien les conditions de fonctionnement de l'appareil.

c. Analyse isotopique

L'argon ainsi purifié est introduit dans le spectromètre de masse. Cette mesure est aisée pour les échantillons d'âge élevé qui ont accumulé une quantité d'argon importante. Tout l'argon mesuré étant de nature radiogénique et les contaminations par l'argon atmosphérique négligeables. Toutefois, pour les échantillons d'âge plus jeunes, la quantité d'argon accumulée est moindre ; plus encore s'ils sont pauvres en potassium. Dans ce cas, la part de la contamination devient prépondérante. Cette contamination correspond à l'argon atmosphérique occlus dans le minéral lors de sa formation, adsorbé à sa surface ou intégré dans les zones d'altération, ajouté lors de sa préparation (broyage, lavage) ou par les différents matériaux chauffés au cours de la procédure expérimentale d'analyse (verrerie pyrex ou quartz, creuset en molybdène pour l'extraction, mousse de titane portée au rouge pour la purification etcÉ). Nous voyons donc ici apparaître le paradoxe de la datation vers les âges récents : plus l'échantillon sera jeune, plus la quantité d'argon radiogénique accumulée sera faible et donc d'autant plus dilué dans la quantité d'argon de contamination.

Bien entendu le premier souci de l'analyste - et c'est une part importante du progrès effectué vers les âges très récents - sera d'abaisser le blanc d'analyse et la contamination apportée par la procédure expérimentale. Ce sera aussi sa préoccupation constante de s'adresser à des minéraux frais et sains, dont l'état de surface et les golfes de corrosion ne favoriseront pas l'adsorption d'argon atmosphérique. Car cette contamination provient de l'argon présent dans l'atmosphère. On l'a dit plus haut, l'argon, parce qu'il procède de la radioactivité du potassium 40, n'est plus un gaz rare : il est en abondance le troisième constituant de l'air que nous respirons. Libéré en profondeur au cours des transformations minérales (fusion, métamorphismeÉ), il migre vers la surface et est libéré dans l'atmosphère où il s'accumule. C'est pour cette raison que l'argon 40 est aujourd'hui l'isotope le plus abondant de l'argon : il est 296 fois plus abondant que l'argon 36, l'isotope initialement le plus abondant et qui ne profite d'aucune réaction radioactive sensible.

Le rapport argon 40 / argon 36 dans l'atmosphère étant déterminé à 296 (Nier, 1952), il va être possible de corriger de la contamination atmosphérique. Pour cela, on effectue la mesure isotopique de l'argon extrait de l'échantillon : 40, 36 et 38. On a vu que 36 et 38 sont issus des processus nucléosynthétiques avant l'individualisation de notre système solaire et la condensation des planètes. Ils sont donc essentiellement atmosphériques. On peut donc utiliser la mesure de ces isotopes pour corriger de la contamination : en multipliant la valeur du 36 mesuré (ou du 38) par le rapport de cet isotope à l'argon 40 dans l'air (40/36 = 296 ; 40/38 = 1535) on peut déduire la quantité d'argon 40 liée à la contamination atmosphérique dans l'échantillon. Par simple soustraction à la valeur de l'argon 40 total mesuré, on obtient la quantité d'argon 40 radiogénique :

40Ar total = 40Ar radiogénique +40Ar de contamination.

Cette mesure se fait grâce à l'isotope 36 car il est 5 fois plus abondant que le 38 et donc sa mesure est plus aisée et plus précise ; notez que dans cette procédure de correction, on amplifie l'incertitude de la mesure analytique du 36 par le facteur 296 de la multiplication, incertitude que l'on reporte sur le dosage de l'argon radiogénique.

 

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