Le Champ paléomagnétique moyenné sur le dernier million d'années

J. Carlut, X. Quidelleur, V. Courtillot

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Afin de compléter les bases de données disponibles à ce jour, 26 coulées de lave couvrant le dernier million d’années ont été échantillonnées sur l’Ile de La Guadeloupe pour une étude paléomagnétique du champ moyen. Le choix de ce site a été motivé par l’absence de données satisfaisant aux critères modernes de qualité dans cette région du Globe. En l’absence de séries stratigraphiques continues, la datation absolue de chacune de ces coulées a été rendue indispensable. Nous avons utilisé la technique K-Ar Cassignol qui est la mieux adaptée à ce type de lave. En effet, le fort contenu en Ca des andésites produirait une production importante d’36Ar lors d’une irradiation pour datation par la technique 40Ar/39Ar, ce qui conduirait à une incertitude trop large sur l’age. Les nouveaux ages K-Ar obtenus lors de cette étude sont compris entre 0.05 et 1 Ma, et viennent compléter les données déjà disponibles sur la Basse Terre de Guadeloupe (Blanc, 1983).
Plus de 200 carottes paléomagnétiques ont été prélevées et étudiées en utilisant la désaimantation par paliers de température ou de champ alternatif. Afin de tester la reproductibilité intra-site des directions paléomagnétiques, deux coulées ont été prélevées en trois endroits distants de plusieurs centaines de mètres. Les résultats montrent que la dispersion inter-coulée est négligeable. La comparaison directe pour deux coulés entre nos résultats et les directions paléomagnétiques obtenues sans désaimantation par palier il y a plus de vingt ans (Briden et al., 1979) montre une différence significative. Ceci souligne la nécessité d’éliminer ce type d’étude antérieure dans les bases de données modernes. Les trois coulées superposées, constituant la seule coupe identifiée lors de cette étude, ont enregistré le changement de polarité Matuyama-Brunhes, avec un age moyen de 783 ± 18 ka.

Le pôle paléomagnétique moyen, calculé à partir des 23 coulées de polarité Normale du chron de Brunhes (0 - 790 ka), est confondu avec le pôle Nord géographique. Ceci implique que la présence d’un quadrupole zonal persistant ne peut être mise en évidence à ce site. Ce résultat est en contradiction avec l’étude antérieure effectuée dans cette région du Globe par Bridden et collaborateurs (1979), et a de fortes implications sur les modèles de champ paléomagnétique moyen pour les 5 derniers millions d’années. L’inversion que nous avons effectué en substituant notre nouvelle direction moyenne pour la Guadeloupe à la donnée préalablement disponible (Briden et al., 1979) montre une forte différence dans les coefficients de Gauss obtenus. Notamment pour le terme g20 (quadrupole zonal), le seul terme persistant unanimement identifié (e.g. Carlut et Courtillot, 1998), voit sa valeur moyenne réduite de 30%. Cet effet dramatique observé en changeant simplement un seul de la centaine de sites constituant la base de données actuelle (Quidelleur et al., 1994), suggère fortement que les anciens sites doivent être ré-étudiés. De plus, cette étude démontre que la complexité des structures géométriques du champ moyen que l’on peut identifier à partir des données paléomagnétiques actuelles doit rester limitée au degré 2.